08/12/2020

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Située à l‘une des entrées de la commune, la Maison à la fois musée, lieu de recherches et vitrine de l‘art contemporain possède cette faculté de toucher un large public, qu’il soit admirateur de longue date des deux écrivains ou issu de la jeune génération. Retour sur l’origine de ce lieu d’expression.

De la fin du XIIe siècle au début du XIXe siècle, le Moulin de Villeneuve, posé sur La Rémarde, a joué pleinement son rôle, comme tous les moulins de l‘époque : transformer le blé de la Beauce en farine. Ensuite, il est devenu un lieu d‘habitation, dans lequel de nombreux propriétaires se succéderont jusqu‘en 1951. Cette année là, Louis Aragon et Elsa Triolet, les écrivains parisiens, en font leur résidence secondaire. Le calme des lieux à proximité de la capitale est idéal pour y écrire, stocker leurs livres et recevoir les amis : Picasso, Fernand Léger, Edmonde Charles-Roux, François Nourissier…
Le couple y puise son inspiration. Dans « La chambre d’Elsa », Aragon décrit la chambre du Moulin : « Telle qu‘on se l’imagine. Et très différente à la fois. […] la pièce a la forme d’une parenthèse, le mobilier d’une digression. Elle est verte, bleue ou mauve selon les gens. Il y a même quelqu’un qui l’a vue jaune paille, cela devait être un esprit compliqué ». Dans « Roses à crédit », roman d’Elsa Triolet publié en 1959, l’héroïne principale Martine Peigner, 14 ans est inspirée d’une voisine de Saint-Arnoult-en-Yvelines. Dans son recueil de poème « Les yeux et la mémoire » publié en 1954, Aragon, décrit Elsa dans le parc de 6 hectares du Moulin :
« Elle rêvait
Rêver est souvent une étude
Je la voyais aller venir dans la maison
Dans la maison tout se faisait à l’habitude
L’habitude aux rêveurs est seconde raison
Elle rêvait allait venait mettait la table
S’inquiétait de tout avec des mots absents
Semblait comme toujours de tout être comptable
Et sa main caressait les chiens noirs en passant »

Extrait  de « Le Cheval Roux ». 

C‘est d‘ailleurs dans ce même parc qu’elle meurt le 16 juin 1970. Date encore figée aujourd‘hui sur l’éphéméride situé dans la maison, face à la salle de bain. Aragon y a arrêté le temps. À la mort d‘Elsa, il va obtenir auprès du Président de la République Georges Pompidou une dérogation d’ériger un caveau pour Elsa et lui dans le parc du Moulin.
En 1976 Aragon décide de léguer le Moulin de Villeneuve et tout ce qu‘il contient (mobilier, œuvres d’art, manuscrits et la correspondance du couple) à la Nation, et ce quel que soit le Gouvernement.
L’État accepte ce legs en 1984, deux ans après la mort d’Aragon, le 24 décembre 1982.
S’ensuivent alors dix années de travaux de mise aux normes, avant l’ouverture au public en 1995.
  
Un legs conditionné
Aragon souhaite que le Moulin poursuive l’œuvre du couple pour en faire un lieu :  
- de mémoire par la conservation de ses appartements et la présence du tombeau du couple dans le parc.
- de recherche riche de 30 000 ouvrages (plus les manuscrits accessibles au plus grand nombre à la Bibliothèque Nationale de France), auxquels s’ajoute un important fonds photographique de la vie du couple. Des clichés pris par des photographes de renom : Robert Doisneau, Edouard Boubat, Willy Ronis, Daniel Wallard, Pablo Volta…
- vivant ouvert à la création contemporaine.

Une association pour faire vivre le Moulin et son parc
Pour exaucer les souhaits de l’artiste, les proches de l’écrivain créent une association dénommée « Centre de recherche et de création Elsa Triolet Aragon ». 
Les membres de droits sont des représentants de l’État, de la région Île-de-France, du département des Yvelines et de la ville de Saint-Arnoult-en-Yvelines. L’association regroupe également les membres fondateurs de tous bords politiques et de différents horizons artistiques. Elle a été présidée par l’amie du couple, Edmonde Charles-Roux jusqu’à sa mort en 2016. L’académicien Erik Orsenna, de son vrai nom Eric Arnoult, lui succède depuis. 

Comment est gérée la Maison ?
Au fil du temps, l’appellation « Centre de recherche et de création Elsa Triolet Aragon », devient « La Maison Elsa Triolet-Aragon ».
Hormis les œuvres des artistes qui peuplent le parc et qui ont été données ou prêtées à l’association, les murs et les collections du Moulin appartiennent toujours à l’État et plus précisément à la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC), qui finance l’entretien du bâtiment. L’association composée de 10 salariés gère et fait vivre le lieu.
L’association s’autofinance à 56 % par la billetterie, sa boutique et le mécénat privé. Son budget est complété par des subventions (l’État, la Région, le Département et des communes). Son conseil d’administration nomme le directeur de l’association. Après Bernard Vasseur aujourd’hui directeur honoraire, depuis 2 ans Guillaume Roubaud-Quashie, professeur d’histoire et de géographie agrégé d‘histoire dirige l‘association.
 
Exaucer le souhait d’Aragon...
Aragon mettait tout en œuvre pour faire connaîre ses amis artistes. Il écrivait sur eux, dans les catalogues et dans la presse. 
La Maison poursuit cette démarche et met en avant de nombreux artistes contemporains que l’on peut approcher lors des vernissages. Tant des artistes en devenir que de renom, qui aiment exposer à la Maison, entre deux expositions internationales, à l’image de Julio Le Parc en 2019, entre New-York et le Palais de Tokyo à Paris.
 
… et même au delà
Preuve que l’association répond aux volontés de l’écrivain, outre les deux salles d’exposition du Moulin, son parc est devenu un hall d’exposition à ciel ouvert avec 30 œuvres présentes en permanence, complétées d’œuvres temporaires selon l’exposition en cours.
Le chant, la musique et le théâtre ont également trouvé leur place depuis quelques années dans le Parc, avec l’arrivée du bal parquet. 
Des conditions idéales qui réunissent chaque année, parmi les évènements, 600 enfants et adultes à l’occasion de la chasse aux oeufs conjointement organisée entre la Maison et la mairie ou « jardin en fête » qui réunit associations locales et spectacles d’art de rue. Une place importante est donnée aux actions culturelles éducatives. Plusieurs projets en faveur des jeunes éloignés de culture, des détenus, des personnes en situation de handicap naissent chaque année (rencontres avec des artistes, publications de recueils de poèmes, réalisations d’œuvres collectives…).
 
Une nouvelle saison culturelle
Samedi 6 février, la nouvelle saison culturelle débutera l’année 2021 avec les installations de Jean-Luc et Titi Partant, dont notamment celle d’une « bibliothèque idéale », en hommage aux deux écrivains, Elsa Triolet et Aragon.
Maison Elsa Triolet-Aragon
Moulin de Villeneuve
Réouverture pour la saison 2021 : lundi 1er février 2021
www.maison-triolet-aragon.com - Tél :  01 30 41 20 15


20 000 Le nombre annuel de visiteurs dont 50% de scolaires qui passent chaque année le portail de la Maison.
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Poésie dans la ville s’exporte
Située sur la « Route des Maisons d‘Écrivains », et pour cause, notre commune s‘est  vu décerner en 2014 le label “Villes et villages en poésie“, attribué aux communes qui donnent à la poésie une place prépondérante dans la vie locale et dans la politique culturelle municipale. D‘où l’organisation chaque année de l’installation éphèmére conjointement menée par la Maison et la commune, intitulée « Poésie dans la Ville » à l‘occasion du « Printemps des Poètes ». Une recette créée chez nous et qui aujourd‘hui s’exporte dans toute la France et contribue au renom de la Maison.
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