21/12/2023

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Dans l’édition de l’Éclair d’avril 2022, il était question des espèces végétales exotiques envahissantes. Certaines espèces animales ont aussi été importées avec le même caractère envahissant : Écureuil de Corée, ragondin, rat musqué, bernache du Canada, perruche à collier, tortue de Floride, écrevisses américaines, coccinelle asiatique, frelon asiatique… Et bien d’autres…
Ragondins, écrevisses américaines et perches soleil fréquentent les milieux aquatiques et sont présentes au parc de l’Aleu, dans les étangs et dans notre rivière.


Ces espèces ne sont pas là par hasard. C’est l’homme qui dans la majeure partie des cas les a introduites volontairement en France pour la production de certaines ressources (nourritures, fourrures…) ou pour en faire des animaux de compagnie. Hors de leur écosystème d’origine, ces espèces on une tendance à proliférer, par l’absence de leur prédateur naturel ou grâce au climat qui leur est plus propice, amenant à une compétition acharnée avec les espèces autochtones. 

LE RAGONDIN
Toujours bien présent sur nos berges d’étangs et de rivières, le ragondin est inscrit depuis 2016 dans la liste des espèces exotiques envahissantes.
Ce rongeur d’eau, de 40 à 60cm de longueur pour environ 7kg, au pelage brun-roux présente un aspect massif, moustaches blanches et incisives orange. On peut le confondre avec le rat musqué Ondatra
zibethicus, beaucoup plus petit au museau arrondi et à la queue comprimée latéralement.

Originaires d’Amérique du Sud, introduits en 1882 puis dans les années 1920, recherchés pour leur fourrure, les ragondins des élevages se sont échappés et ont été relâchés après que leur toison soit passée de mode. L’espèce occupe aujourd’hui toute la France à l’exception des zones de montagne. On la trouve dans notre commune. Le ragondin fréquente les milieux aquatiques d’eau douce ou saumâtre. On peut le voir trottiner broutant feuilles et tiges, racines ou écorces, plongeant ou retournant vers une de ses entrées de terrier creusées au niveau de la berge. On reconnait son passage à la forme de ses traces et aux coulées d’une largeur de 15 cm qu’il laisse derrière lui, menant souvent à l’eau.

Prolifique, la femelle peut donner naissance à 5 petits en moyenne 2 ou 3 fois par an. Les jeunes se reproduisent dès l’âge de 6 mois.
Très bon reproducteur, grand consommateur de végétaux et véritable machine à creuser voilà ce qui fait du ragondin une espèce à surveiller. Il faut donc limiter ses populations et favoriser les prédateurs chassant les jeunes. Les hivers rigoureux ont un impact négatif sur ses populations.
- Dégradation des berges et dommages sur les ouvrages hydrauliques, destruction des frayères et de l’habitat d’autres animaux comme les batraciens, oiseaux… perturbation de l’écosystème local
- Porteur de la leptospirose, la douve du foie, agents pathogènes transmissibles aux animaux domestiques et à l’homme
- Provoque des dégâts sur les végétaux aquatiques, les végétaux des berges, les arbres proches de l’eau
En France il n’a pas de prédateur naturel à l’état adulte. On estime que la régulation naturelle des populations se fait selon trois axes :

La prédation : On observe un prélèvement des jeunes ragondins par les renards, des petits mammifères carnivores comme la fouine ou certains rapaces. D’autres prédateurs comme la loutre ou le putois ont vu leurs populations fortement régresser au XXe siècle
Les hivers froids : Le ragondin est sensible aux hivers froids. Les vagues de froid intense et de longue durée (1947, 1956, 1985, 1987) ont ralenti l’explosion démographique de l’espèce puis, dans une moindre mesure celles de 2001 et 2012 beaucoup moins fortes. Le changement climatique pourrait avoir des conséquences avec les hivers plus doux.
Le territoire disponible : Le ragondin est présent dans les zones humides favorables et son modèle social en petits groupes de 3 à 20 individus par hectare fait que l’on approche de la saturation dans certains endroits, ce qui devrait se solder par une diminution de la natalité.
Le contrôle des populations est autorisé sous certaines conditions (piégeage, chasse). Trop tard pour éradiquer cette espèce comme tant d’autres, les efforts de chasse et de piégeage permettront peut-être de limiter leur présence mais il faudra s’en accommoder ! Le piégeage peut s’avérer provisoirement efficace sur de petites superficies où l’action est menée intensivement. En revanche, la stratégie de régulation à l’échelle communale, régionale ou nationale est inefficace.
L’utilisation de poison est strictement interdite en raison des dégâts sur la faune et des risques pour l’homme. Il peut être piégé par des piégeurs agréés de façon sélective toute l’année.

LES ÉCREVISSES AMÉRICAINES
L’écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes), l’écrevisse à pattes rouges (Astacus astacus), l’écrevisse des torrents (Austropotamobius torrentium) sont des espèces présentes naturellement en France. Elles sont menacées de disparition par la dégradation de leur habitat et par la présence des espèces d’écrevisses américaines. Ces espèces sont inscrites sur la liste rouge de l’Union Internationale de Conservation de la Nature (UICN) comme étant « vulnérables » à l’échelle nationale.
Elles sont progressivement remplacées par plusieurs espèces d’écrevisses invasives.

L’espèce autochtone en Île-de-France est l’écrevisse à pattes blanches, Austropotamobius pallipes, exigeante, elle fréquente les eaux bien oxygénées et non polluées. Elle est peu présente et localisée dans seulement quelques rares stations.
Les écrevisses invasives sont signalées dans nos plans d’eau et rivières :
Les six espèces d’écrevisses allochtones sont l’écrevisse américaine (Faxonius limosus), l’écrevisse du Pacifique (Pacifastacus leniusculus), l’écrevisse de Louisiane (Procambarus clarkii), l’écrevisse à pattes grêles (Astacus leptodactylus), l’écrevisse juvénile (Orconectes juvenilis) et l’écrevisse calicot (Orconectes immunis). L’écrevisse à pattes grêles étant considérée comme acclimatée en France.
Elles sont présentes dans la Rémarde et dans nos plans d’eau :
L’écrevisse américaine
(Faxonius limosus), originaire de la côte Est des Etats-Unis et introduite dans le Cher en 1911 s’est répandue sur toute l’Europe de l’Ouest. 
L’écrevisse signal (Pacifastacus leniusculus), originaire de la côte Ouest des Etats-Unis a été introduite en Suède en 1960, importée en France en 1976 et sa présence est aujourd’hui effective dans tous les grands bassins hydrographiques. 
Elles posent de gros problèmes écologiques car elles occupent un large spectre de milieux supportant périodes de sécheresse et températures extrêmes, n’ont que très peu de prédateurs, de parasites, de compétiteurs et sont vectrices de maladies affectant nos espèces locales car souvent porteuses saines de l’aphanomycose « peste de l’écrevisse ».
Omnivores, elles se nourrissent d’animaux vivants et de débris. Dans certaines localités on observe une disparition des têtards d’amphibiens…
Héron, aigrettes, anguille, brochet ou sandre sont des prédateurs assez efficaces. Le piégeage par nasse fonctionne assez bien. Mais l’élimination complète de ces espèces parait toutefois difficile.
Ces espèces invasives peuvent être pêchées avec un permis toute l’année. En revanche il est strictement interdit de les remettre à l’eau ou de les transporter vivantes.

LA PERCHE SOLEIL
Avec ses écailles de belle couleur « arc-en-ciel », sa taille de 10 à 15 cm, cette perche est originaire du Nord-Est de l’Amérique du Nord. 
Elle est présente aujourd’hui sur de nombreux continents et a été introduite en Europe aux alentours de 1877 pour la pêche de loisir.
Extrêmement vorace, exerçant une prédation importante sur les œufs de poissons, avec une croissance rapide et une bonne reproduction, elle modifie toute la chaîne alimentaire du milieu où elle s’installe et peut être responsable localement de la disparition d’espèces de poissons autochtones.
Elle est classée parmi les espèces exotiques envahissantes sur le territoire depuis 2020. Il est interdit de la rejeter à l’eau une fois pêchée.
Modification des écosystèmes, compétition, hybridation, maladies, nuisances aux infrastructures, pertes agricoles et piscicoles, allergies, piqûres… Les impacts écologiques des espèces exotiques sont multiples, difficiles parfois à évaluer et souvent irréversibles.
Diverses études indiquent que le changement climatique est favorable à l’implantation de nombre de ces espèces qui savent avec brio s’adapter aux nouvelles conditions locales offertes… Tout laisse à penser que nous allons maintenant devoir vivre avec pendant longtemps sans doute au détriment de nos espèces locales impactées !