25/03/2023

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Lorsqu’on prononce ou entend le mot « abeille », notre inconscient renvoie deux images : ruche et miel. Il est alors guidé par notre ignorance, et ne se limite qu’à l’abeille domestique. Car oui, il existe une abeille sauvage et elle ne vit pas en ruche et ne produit pas de miel. Or oui, il existe plus de mille espèces d’abeilles sauvages. Elles sont parfois solitaires, ne donnent pas toujours du miel mais toutes contribuent à la pollinisation.

Une légion d’insectes pollinisateurs
Près de 10 000 espèces d’insectes interviennent, en France, dans la pollinisation des plantes : les diptères (mouches, syrphes…), les coléoptères (charançons chrysomèles, coccinelles…), les lépidoptères (papillons), les hyménoptères comme les abeilles, les bourdons ou les guêpes ne sont que quelques exemples... D’autres animaux assurent aussi la fécondation dans le règne végétal mais dans une moindre mesure. Quant au vent, il permettra la pollinisation de certaines plantes que l’on dit anémophiles comme les bouleaux, les saules...

Palme d’or aux abeilles
Les abeilles domestiques et surtout les méconnues et souvent oubliées, abeilles sauvages, contribuent à la fécondation de 70% des plantes, étape essentielle à l’élaboration des fruits et des graines. Dans notre pays, les abeilles sont représentées par 6 familles, comprenant près de 1000 espèces.

L’abeille domestique : une seule espèce (Apis mellifera) 
Une seule parmi toutes ces espèces correspond à notre abeille domestique qui utilise le nectar et le pollen des fleurs et nous donne le miel. 
L’apiculture a pris un essor considérable ces dernières années, car comprendre le fonctionnement d’une colonie présente un intérêt particulier pour beaucoup d’amoureux de la nature. 
Néanmoins une interrogation se pose face à l’augmentation des effectifs des abeilles domestiques : quel impact ont ces abeilles domestiques sur la présence et la vie des abeilles sauvages ?                                             

Les abeilles sauvages : près de mille espèces en France 
La plupart sont solitaires et ne produisent pas de miel. Cependant leur rôle de pollinisatrices est des plus importants. Elles ont besoin des ressources alimentaires de fleurs variées, d’un lieu de nidification et chaque espèce a ses exigences et utilise des matériaux spécifiques comme la terre, l’argile, le petit gravier ou la résine...

Quelques abeilles sauvages : 
- La collète du lierre et son nid dans le sol 
À l’automne lorsque les fleurs se font plus rares, c’est l’époque de la floraison, décalée et abondante du lierre. Une petite abeille Colletes hederae s’est spécialisée pour profiter de cette abondance de nourriture et on observe cette espèce, bien que solitaire, parfois en grand nombre en train de butiner.
C’est une abeille qui niche dans la terre, son cycle est synchronisé avec celui du lierre et ses larves sont nourries d’une bouillie de pollen et de nectar provenant de cette plante.
- L’osmie : première petite abeille sauvage à apparaître 
Avec 35 espèces d’osmies en France cette petite abeille solitaire est présente dans les espaces publics et les jardins. Elle niche dans le bois, les tiges creuses, les trous des murs, dans les châssis de fenêtre et les galeries naturelles ou non mais ayant un diamètre de 8 à 10 mm.  Une série de cellules séparées par une cloison en argile chacune contenant une boulette de pollen, de nectar et un œuf.  C’est un des premiers pollinisateurs à visiter les fruitiers. 
- L’abeille charpentière ou xylocope 
Elle ne passe pas inaperçue à cause de sa taille respectable, de son vrombissement peu discret et de sa belle couleur d’un bleu violacé. C’est la plus grande espèce d’abeille sauvage, elle est munie d’une grande trompe. Ses deux puissantes mandibules lui permettent de creuser les vieux troncs, les souches ou vieilles charpentes pour y installer des galeries jusqu’à 30 cm de profondeur, munies de logettes qui recevront les œufs et la nourriture des futures larves. 

À chaque espèce ses exigences et la compétition est en jeu : nombre, alimentation, gîtes… 
- Le gîte et le couvert
Contrairement à l’abeille domestique vivant en colonie de plusieurs milliers d’individus dans des ruches, structures artificielles surveillées, les abeilles sauvages vivent en petites colonies ou sont solitaires. Elles font des nids avec des fragments de fleurs, de feuilles, de la résine, de la boue, dans le sol, le bois mort, des interstices… Beaucoup de ces milieux refuges disparaissent sous la pression urbaine et agricole. Les charpentières creusent le bois mort sur pied pour nidifier, les tapissières garnissent les cellules avec des morceaux de feuilles, les fouisseuses creusent des galeries dans la terre ou le sable
Exemple : Andrena cineraria, l’abeille des sables est une espèce solitaire mais que l’on rencontre en petites colonies. Elle creuse des galeries isolées dans le sable des dunes mais aussi des jardins. Plusieurs loges d’élevage, une dizaine dans chaque nid, recueillent chacune une larve avec sa nourriture. 
Les abeilles domestiques ont un spectre de recherche florale très large englobant plusieurs dizaines d’espèces botaniques.Si une majorité d’ouvrières visite une même espèce de fleurs, l’autre partie recherchera en même temps des fleurs différentes. 
Au contraire, beaucoup d’abeilles sauvages ont un spectre alimentaire plus restreint voire déterminé par une seule espèce végétale ce qui les rend plus vulnérables face à la compétition alimentaire.

Les abeilles sauvages en déclin
Beaucoup plus nombreuses, bien protégées dans les ruchers, plus efficaces sur une grande quantité d’espèces botaniques, les abeilles domestiques restent des concurrentes des abeilles sauvages moins nombreuses, moins protégées et plus exigeantes. 
Toutes les abeilles sont sensibles aux produits phytosanitaires utilisés en agriculture. L’interdiction en 2023 du glyphosate dans les milieux de culture est donc bienvenue. Les communes ont adopté la gestion Zérophyto dans tous leurs espaces préservant ainsi la petite faune. Certaines ont mis en place des abris pour insectes et abeilles sauvages en particulier.
Le déclin des abeilles sauvages met en danger notre alimentation et le maintien de nos écosystèmes. D’importantes mesures de conservation en faveur de ces insectes sont aujourd’hui indispensables.
Ainsi il faut rester prudent sur l’implantation de ruchers dans tous les milieux y compris en ville et tenir compte des éléments suivants : réduire le nombre de ruches, respecter des espaces d’implantation de plusieurs kilomètres entre deux ruchers sachant qu’une abeille domestique a un rayon d’action d’environ 3 km, avoir une gestion sanitaire des ruchers attentive et conforme à la réglementation.

Favoriser la présence des pollinisateurs jusque dans la ville et les jardins
- Dans nos espaces communs et nos jardins 
L’idée est de satisfaire les besoins d’un maximum de pollinisateurs en offrant des abris variés, des fleurs et des périodes de floraison qui se succèdent :
- Favoriser l’implantation de la flore sauvage
- Préparer un espace jachère fleurie ou prairie fleurie : mélange de fleurs annuelles ou de fleurs annuelles avec bisannuelles et vivaces ou de graminées et plantes vivaces… 
- Planter des arbres fruitiers, champêtres d’essences locales, conserver du bois mort
- Permettre à la végétation spontanée de s’établir comme le lierre, les ronces, le sureau (souvent des mal-aimés, à tort), le noisetier…
- Penser aux gites comme les arbres morts ou vivants à cavités
- Installer des abris et sites de nidifications comme les hôtels à insectes est un acte bénéfique pour tous : entre construction, pose et observations, beaucoup de satisfactions !
 
- Les espaces verts communaux enrichis
Les espaces verts de la ville sont enrichis chaque année de bulbes, de haies, d’espèces vivaces, résistantes à la sécheresse, présentant un attrait particulier pour la petite faune. Cette année encore les services techniques de la commune sont à pied d’œuvre depuis début mars afin d’entretenir, rénover, améliorer notre patrimoine vert entre plantations et premières tontes. 
Le fleurissement de plusieurs zones sera mis en place rue Jean Moulin sur 720 m2, à l’étang de l’Aleu sur 200 m, dans certaines sentes ainsi qu’au cimetière avec la végétalisation du columbarium.

- Les jardins et balcons des particuliers
Bien pensés, ils offrent également toutes sortes de fleurs, de février à novembre. Fleurs qui deviendront légumes, fruits et graines après le passage des butineurs.
Les balcons, bords de murs et rebords de fenêtres complètent cette panoplie jusqu’en centre ville, quand les riverains jouent le jeu…

Jardiniers, à vos binettes, bêches et râteaux !
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