24/04/2025
Depuis 2018, Bernard Garel règle au cordeau le protocole des cérémonies patriotiques de Saint-Arnoult-en-Yvelines. Des moments toujours teintés d’une rigueur de circonstance qui donne la solennité due à chacune d’elles, mais qui ne manque pas d’impressionner celles et ceux présents pour la première fois face aux monuments commémoratifs de notre commune. Derrière cette rigueur se cachent des valeurs liées notamment au respect, acquises très tôt dès l’enfance et renforcées au fil de sa carrière professionnelle au service de la Nation.
L’homme a le regard fixe, la coupe de cheveux réglementaire et la tenue impeccable. Pour autant, Bernard Garel n’en demeure pas moins un personnage abordable, empreint d’une extrême bienveillance. À 86 ans, il retrace volontiers le parcours de sa vie débutée dans la ferme familiale, le 1er juillet 1939, dans le petit village de Bran-en-Gaël, en Ille-et-Vilaine, à 15 km de la forêt de Brocéliande.
« Je suis le dernier d’une fratrie de 8 enfants, composée de 4 sœurs aînées et de 3 frères. Mes parents étaient cultivateurs. Ils élevaient aussi vaches, chevaux, moutons, volailles, lapins et chèvres. Tout le nécessaire pour subvenir aux besoins de la famille et vivre en totale autonomie. À l’âge de 6 ans, j’ai perdu mon père, Jean-Baptiste, d’une congestion cérébrale. Ma mère, Eugénie, a tenu la ferme seule. Autant dire que j’ai été élevé par mes sœurs. À cet âge déjà, j’amenais les vaches en pâture avant d’aller à l’école. Il n’y avait qu’un seul instituteur pour tous les niveaux. À 14 ans, c’est lui, M. Jourdan, qui m’a emmené avec mes deux camarades de niveau, Jean et Paul, à bord de sa 4 CV pour passer le certificat d’études. En fin de journée, nous l’attendions près de sa voiture, inquiets. Nous étions soulagés lorsqu’il nous a appris que nous étions reçus. À l’époque, au coup de sifflet, les élèves formaient 3 rangs avant d’entrer en classe : les maternelles, les élémentaires et les certifs. Nous lui montrions nos mains, recto et verso, pour lui montrer qu’elles étaient propres. Nous nous asseyions uniquement à son invitation. Il était à la fois notre instituteur et éducateur. De 9 à 13 ans, j’étais choriste à l’église, ce que l’on appellerait aujourd’hui un enfant de chœur. J’assistais le recteur Emmanuel pour les offices du dimanche, mais aussi pour les mariages, baptêmes et enterrements.
À 14 ans, toutes mes sœurs étaient mariées ainsi que l’aîné des frères. Jusqu’à l’âge de 17 ans, je suis resté le seul enfant à la ferme avec ma mère. Les travaux étaient devenus trop fatigants pour elle et moi. Ma mère a donc cédé le bail de location de la ferme et nous avons emménagé dans une autre maison.
J’ai alors été embauché par un transporteur de bestiaux. Nous transportions de 90 à 95 porcs deux fois par semaine, collectés de ferme en ferme, jusqu’aux abattoirs de la porte de la Villette à Paris ».
À tout juste 20 ans, le 1er juillet 1959, Bernard est appelé sous les drapeaux. Il rejoint le 10e régiment anti-aérien léger à Vannes. Après 4 mois de classes, il en sort brigadier. Il part ensuite en Algérie via Marseille, à bord du navire Sidi Ferruch. Débarqué à Bône, il rejoint en train Souk Ahras et la ferme de Sedrata.
« Les lieux étaient tenus par un adjudant, un lieutenant et 11 harkis. J’y avais la responsabilité des munitions, des optiques et du carburant pour ravitailler les forces sur le terrain. Après 3 jours de formation et nommé maréchal des logis, je suis devenu démineur pour faire « sauter » les munitions non explosées lors des interventions, notamment des grenades. Sur place je côtoyais de nombreuses unités. Mon service aura duré 28 mois. En novembre 1961, j’avais hâte de retrouver la vie civile et ma mère. »
Finalement, c’est à nouveau vers le drapeau que le jeune homme se tourne pour débuter une carrière professionnelle. Il réussit le concours de la gendarmerie. Après 6 mois de formation à Châtellerault, il est affecté en 1962 au 1er régiment d’infanterie de la garde républicaine en charge de la sécurité de l’Élysée sous la présidence du Général-de-Gaulle, au grade de garde républicain.
« Après deux années de service et un accident de moto, j’ai été détaché durant 15 ans au secrétariat de la Défense nationale à Paris, puis 20 ans au service du chef d’État-major du Président de la République. Au cours de ma carrière, j’ai côtoyé des chefs de corps, des généraux et des amiraux, aux fortes personnalités et à l’intelligence remarquable. Avec certains, un seul regard suffisait pour comprendre leurs attentes. Tous connaissaient parfaitement leur personnel. J’ai aussi très souvent approché les Présidents de la République Charles de Gaulle, Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand. »
Depuis 1994, Bernard Garel goûte à une retraite bien méritée. Celui qui aura été bien absent du foyer familial pour « raison de service », avait préparé ses vieux jours en construisant, en 1984 avec son épouse Christiane, une maison à Saint-Arnoult-en-Yvelines. Le couple l’occupera avec leur fille Véronique née en 1974, d’abord les week-ends, puis définitivement après avoir quitté la caserne Kellermann.
Adhérent de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Tunisie et Maroc, Bernard Garel dirige les cérémonies patriotiques depuis 2018. Il assure depuis peu la présidence de la section arnolphienne de la FNACA depuis le départ de Claude Houx.
Rendez-vous est donné à toutes et tous le 8 mai prochain face au Monument aux Morts pour la France à l’occasion de la commémoration de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, ainsi que le 18 juin à 18h, place du Jeu de Paume, pour célébrer le 85e anniversaire de l’Appel du Général de Gaulle. Un personnage à qui Bernard Garel aura plusieurs fois serré la main dans le cadre de ses fonctions et qui aura marqué à tout jamais le militaire qu’il a été et l’homme qu’il est.